L’analyse et le prévention des risques, première étape vers la création de valeur dans les opérations LBO
Par Pierre BATTINI
ARTICLE PARU DANS « LA REVUE DU FINANCIER » DE FEVRIER 2008
N° 169 – PRIVATE EQUITY & LBO
Introduction
Les opĂ©rations dites de transmission avec effet de levier, ou encore « leverage buy out », LBO, appartiennent au champ du Private Equity – Capital Investissement en français – le financement d’entreprises non cotĂ©es par des capitaux privĂ©s en apports de fonds propres, donc en haut de bilan.
Apparus dans les années soixante dix en France d’abord sous la forme du Capital Risque ces investissements se sont fortement développés pour atteindre en France le volume de dix à douze milliards d’euros pour les années 2006/2007. C’est beaucoup pour le financement de PME, mais cela ne représente que deux journées moyennes de volumes d’échanges sur le CAC 40.
L’AFIC, – Association française des investisseurs en capital, organisme professionnel – dresse les tableaux statistiques des opĂ©rations des deux cent vingt sociĂ©tĂ©s de gestion gĂ©rant au moins cinq cents fonds d’investissements (en phase d’investissements ou d’extinction).
De ces données (tableau en Annexe 1) on peut retenir les grandes lignes suivantes.
En résumé, une opération de capital risque par jour et une autre de transmission, ces dernières représentant environ 80% des montants investis chaque année.
Concernant les LBO ce pourcentage n’est pas propre à la France et les autres pays européens sont également à ce niveau.
Dommage pour le Capital Risque et le financement des entreprises technologiques, le parent pauvre du Capital Investissement en Europe, à l’exception des pays nordiques, et bien sûr des USA, pays dans lesquels elles sont fortement soutenues par l’argent public.
Les opérations à effet de levier sont souvent contestées au motif que les investisseurs ont des visions à court terme concernant les entreprises achetées, cherchant à maximiser dans le minimum de temps leurs plus values. En réalité, elles sont indispensables pour régler des problèmes de fond de l’économie comme la transmission d’entreprises moyennes à des cadres en l’absence d’héritiers, le rachat de filiales de groupes voulant se concentrer sur leur « core business » ou encore le redressement d’entreprises accompagné d’injection de capitaux ; mais aussi d’autres opérations comme le retrait de sociétés de la bourse lorsque celle-ci ne sait plus ni les valoriser et encore moins les financer.
Ces opérations sont suffisamment connues pour ne pas les représenter en détail, ce qui est fait par ailleurs.
Il faut rappeler que les investisseurs du Private Equity exercent l’activité de « gestion pour compte de tiers ». Ils investissent des capitaux qui leur sont confiés par ceux qui les détiennent, les fonds de pensions, compagnies d’assurances, banques, parfois même personnes physiques… Ils gèrent ces capitaux conformément au « Règlement » approuvé par tous les souscripteurs et qui fixe notamment la politique, le rythme d’investissement, et la durée du fonds.
On dit toujours que les investisseurs recherchent des affaires saines ; on ne saurait leur reprocher encore faudra t il bien analyser les risques apparents, cachés ou potentiels, les estimer, voire s’ils peuvent se concrétiser, les garantir éventuellement et en définitive estimer si le risque global mérite d’être pris ; c’est l’objet de cet article, qui analyse les risques endogènes propres aux sociétés achetées ou aux montages financiers mis en place, ainsi que les risques exogènes.
Les risques de ces opérations sont comme on va le voir nombreux mais peuvent se ranger sous les rubriques suivantes qui constituent les titres des paragraphes que nous allons examiner :
- Les risques intrinsèques à la société achetée
- La constitution d’une équipe managériale en s’assurant de la compétences des repreneurs
- Les risques liés au montage des opérations
- Les risques financiers du montage
- Les risques juridiques et fiscaux
- Les risques Ă©conomiques
- Existe-t-il un risque systémique dû aux LBO ?
La courte histoire des LBO constitue un bel exemple de sophistication de la technique financière en quelques années, histoire marquée par une croissance forte et régulière qui affronte fin 2007 ses premières difficultés bien que faibles. Rappelons que le premier LBO en France, d’une taille intéressante fut celui de Darty racheté dans les années 80 par le Crédit Lyonnais.